Libération de Gouzon 1944

Un document exceptionnel que l'on doit à René Mazedier

Par respect pour les familles j'ai censuré les noms des collabos (Denis LOCHE)

Le cahier de la Libération

Le journal de René Mazedier, tenu pendant son séjour à l'hôtel Beaune de Gouzon, offre un aperçu précieux de la vie quotidienne dans cette petite ville de la Creuse pendant la période troublée de la libération de la ville. Son récit, donne des détails historiques qui constitue une ressource précieuse sur la commune de Gouzon.

Le fait que René ait choisi de tenir un journal pendant cette période montre son désir de documenter et de comprendre les événements qui se déroulaient autour de lui.

Le journal de René Mazedier est donc bien plus qu'un simple récit personnel ; c'est un témoignage précieux de l'histoire locale et de l'expérience humaine pendant l'une des périodes les plus tumultueuses de notre pays.

Ce cahier décrit les événements vécus sur de la ville de Gouzon de juin à septembre 1944. Il nous aide à comprendre et situer la chronologie de la libération de la ville. De surcroît, il détails avec exactitudes les faits qui avaient été rapportés par nos anciens, quelques peu déformés avec le temps. J'ai découvert ce cahier seulement en 2024 après avoir retrouvé les petits enfants de René Mazedier, qui avaient gardés précieusement ses notes.

 

 

 

Couvre feu à 9 heures depuis le 12 juin (environ) remis à 10 heures le 25 juin.

16 juin : Visite de quelques maquisards mal habillés avec des écharpes tricolores ou toiles kaki. Quelques uns en soldats, brassards tricolores, Ils sont une dizaines. Ils dévalisent la Poste, prennent 16000 francs et reparte en camion. Un quart d'heure après passage de troupes allemandes en camion. Nous l'avons échappé belle !

Le 7 juin : 35 hommes faisant partis de la Résistance arrivent à Guéret, Puis arrivent en camion les maquisards qui bouchent les accès de la ville. Ils investissent la place Bonnyaud (Ils sont environ 1500).

L'Hôtel Saint François était occupé par les troupes allemandes. Elles ont résisté et l'hôtel a été brûlé. De même l'hôtel Auclair a été sérieusement touché. Il reste les murs et le toit.

Il y avait à Guéret une école de cadres, Elle s'est lancé dans la bagarre mais le colonel ne l'a pas suivi. Ils ont mis le feu. Cela a duré quelques heures. Il y a eu des tués.

Vers 2 heures les allemands ont demandé à se rendre. Ils ont été enfermés dans la prison de Guéret. En même temps de nombreuses arrestations de types de la Milice, et ils sont fusillés. A la fin de l'après-midi on annonce que tout est fini, que les allemands ont quitté le centre de la France, Alors il y a un début de pillage dans Guéret. Le préfet Vasserot ordonne viande à volonté – pain blanc. La résistance avait fait imprimer des affiches par un imprimeur de Guéret (qui est aujourd'hui arrêté) qui proclament la libération de la ville. Pendant 24 heures Guéret jouira d'un gouvernement autonome et aura un comité de salut public.

8 et 9 juin : Répression. Le 8 les allemands brûlent trois fermes au pont à La Dauge avant Guéret. Le 9 Guéret est bombardé par avion.

8 juin : Répression également à Gouzon. Les allemands investissent la place. Ils sont arrivés en camion avec des mitrailleuses lourdes. Mais heureusement rien ne se passe.

Mercredi 21 juin : Un régiment allemand vient coucher à Gouzon . Ce régiment est composé d'hommes qui sont pour la plupart à pied. Ils sont très jeunes. Ils s'installent sur le champ de foire. D'autres bivouaques dans la champ en face de chez Geneviève.Ils mènent leurs chevaux à la rivière et prennent toute la paille de monsieur Pinet pour leur litière. Ils tuent un mouton appartenant à monsieur Duchier. Ils repartent le lendemain matin de bonne heure... sans avoir fait de gros dégâts. Deux de leurs officiers ont couché à l'hôtel. Deux autres ont réquisitionné une chambre chez le docteur Fauvet.

22 juin : Le matin, le tambour passe et annonce que tous les possesseurs de camions de camionnettes, voiture tourisme, motos... doivent faire une déclaration à la mairie. Il est interdit de changer les véhicules de place.Tous les jours ou presque il passe des troupes allemandes en camion. Deux fois, il est passé des camions avec parait-il, des hommes de la Gestapo. Quelques uns étaient accompagnés de femmes. Toujours le 22 il est passé un régiment d'allemand qui est allé couché à Parsac. Ils se sont installés chez monsieur Parry. Les régiments viennent tous de la route de Montluçon et se dirigent vers Guéret. On ne sait rien d'autre à propos de leur destination.

24 juin : Dans la soirée, visite du maquisards. 8 ou 9 jeunes gens bien habillés, cette fois, arrivent en camion, prennent l'une des deux motos de la gendarmerie et s'en vont. Ils sont sympathiques et disent qu'ils n'ont pas rencontré d'allemands.

26 juin : Nombreuses arrestations par la Milice à Guéret. Les gens arrêtés sont presque toutes des personnalités de la ville.

Le procureur de la République

Le secrétaire général de la préfecture

L'archiprêtre

L'avocat Lemoine (que les allemands avaient déjà pillé)

Quelques médecins et commerçants.

27 juin : A Saint-Loup les maquisard ont fixé le prix de beurre  à 30 francs la livre et 25 francs la douzaine d’œufs

Fin juin : Les maquisards reviennent à Gouzon, vont à la mairie prendre les tickets d'alimentation (seuls les J3 et les T), vont au bureau de tabac et déclare « Gardez le tabac des prisonniers et partageons le reste », Ils préviennent les gens qu'ils reviendrons bientôt.

Samedi 1er et dimanche 2 juillet : Dans la nuit un convoi allemand passe, un camion fait une embardée et rentre dans l'école. Le camion est endommagé. Il y a quelques blessés. Les allemands vont demander la voiture de monsieur Jabaudon. Celui-ci répond qu'elle ne marche pas. Alors ils viennent trouver monsieur Robert accompagné de monsieur William qui les accompagne à Néris. Le camion endommagé reste là. Le dimanche un camion allemand arrive par réparer et amener le camion. Ils restent presque toute l'après-midi

Lundi 3 juillet : Après le petit déjeuner on apprend que 40 maquisards environ sont massés du côté des Forges à 5 kilomètres de Gouzon. Ils sont installés derrières les Bouchiers et camouflés. Ils attendent des camions allemands. Aussi, aujourd'hui le service de colis ne monte pas à la gare, et le soir le train ne vient que jusqu'à Chanon.

Toute la journée on entend des coups de canons mais on ne sait rien de ce qu'il se passe. On sait maintenant que ce sont des canons allemands.

4 juillet : Ce matin on entend encore des coups de canons mais ils viennent de plus loin. On sait que quelques allemands ont été tués. Les camions ont disparu. On suppose qu'ils sont aux mains du maquisards. On sait à présent que non. Dès que cette nouvelle a été connue de nombreuses personnes ont fait leurs valises et on fui Gouzon dont, le docteur Fauvet et sa famille qui est partie la première. Puis Riotat... les Jabandon... etc.... Monsieur et madame Bernard, pensionnaire de l'hôtel sont allés couchés en ville (Dieu sait pourquoi). En réalité beaucoup de gens ont très peur. Ils croyaient que des représailles de la part des allemands. Ils s'imaginaient que Gouzon allait être incendié.

4 et 5 juillet ! A Ajain, il y a un engagement entre les maquisards et allemands. Ceux-ci conduisent des camions. Il y a un homme par camion. Les maquisards ne sont pas parvenus à arrêter un seul camion. Les maquisards ont annoncés qu'ils allaient faire la mobilisation des gens de la classe 1939 à 1945

Les affiches de la mobilisation sont déjà posées à Evaux. Les garçons qui ne s'engagent pas seront portés déserteurs.

On dit qu'à Gouzon des avions anglais et américains ont parachutés des hommes sur Felletin.

Le maquisards a fait sauter un pont de chemin de fer à Cressat. Le train s'arrête désormais à la gare de Parsac. Des voyageurs viennent de toute la campagne environnante prendre le train à Parsac qui devient momentanément une gare importante.

Au sujet de l'engagement entre le maquisards et les allemands à Parsac on a su finalement que les maquisards étaient environ 25. Ils ont attaqués les allemands pour les effrayer, semble t-il, parce qu'après les premiers coups de mitraillettes ils se sont sauvés et ont même abandonné leur camion. Les allemands ont déclaré 3 morts et 6 blessés. Les maquisards ont eu deux morts dont un lieutenant. Les maquisards sont revenus chercher leurs deux morts et leurs camions le lendemain.

Les allemands ne passent plus en convoi la nuit depuis cet engagement.Et quand ils passent, ce qui arrive tous les jours, ils sont armés jusqu'aux dents et ont les mitraillettes braquées sur les habitants. Le nombre d'allemands dans les camions est très petit. Lorsqu'ils s'arrêtent la première chose qu’ils demandent « Nicht terroristes ? » Ils ont très peur du maquisards. Portant ce dernier n'a pas remporté de grand succès dans la région.

6 juillet : Un convoi allemand s'est arrêté à Gouzon. Des miliciens se sont rendus chez certains habitants. Ceux qui ont des voitures, en particulier chez monsieur Robert S... et le Docteur Housselot. Ils ont dit qu'ils n'avaient pas besoin des voitures mais si le maquisards venait les chercher et que les habitants les laissent prendre, les propriétaires des voitures seraient fusillés. Pas réjouissant.

Jeudi 7 juillet : Huriel. Quelques maquisards viennent pour taxer les prix. Ils se rendent chez Verneiges qui les reçoit à coups de pistolet. Ils n'étaient pas armés, en tous cas ne s'en sont pas servis de leurs armes. L'un d'eux blessé au bras s'est fait soigné par Bellat. Immédiatement après la milice est arrivée et a amené Verneiges sa femme et son fils en lieu sûr. Ils étaient 150 parait-il.

11 juillet : Les maquisards et venu faire un tour à Gouzon ce matin. Ils sont arrivés par camion. Ils ont été chercher le tabac chez Puiet qui ne voulait pas le donner. Les maquisards se sont dispersés dans Gouzon. Ils sont allés demander 200 litres d'essence chez Delannoy. Madame Delannoy a répondu qu'elle n'avait pas 200 litres d'essence et a ajouté au garçon qui les lui demandait. C'est de monsieur Paul que vous tenez ce renseignement. Le maquisards n'a rien répondu, a insisté tout de même et madame Delannoy a dit qu'elle avait 20 litres d'essence qu'elle mettait à leur disposition.

Devant l'église un homme passait en vélo. Après avoir discuté l'homme a été obligé de donner son vélo, qui lui a été rendu d'ailleurs.

Ce soir après le déjeuner un convoi de camions allemands est passé. Ils se sont arrêtés et allés perquisitionner chez Néret dans le quartier haut. Le fils est commissaire de police à Montluçon. Puis ils ont vu un attroupement devant l'hôtel Bignet. Ils s'y sont précipités et on perquisitionné toutes les chambres de l'hôtel. Ils ont dit rechercher un garçon du nom de Catalot. Brunet  et Loiseau qui sont trois gars du maquisards, dont le premier est communiste. Il y a certainement un ou plusieurs miliciens dans le pays pour faire ces dénonciations.

13 juillet : Ce matin sur la route de Montluçon à la hauteur du pond Charaud, trois pensionnaires de l'hôtel qui allaient à Montluçon en vélo se sont fait arrêter par deux officiers en tenue (maquisards) qui leurs ont interdit de continuer leur chemin et les ont fait mettre à plat ventre car des coups de mitrailleuses arrivaient de tous côtés. Les maquisards, on ne sait plus leur nombre, tentaient d'arrêter deux camions allemands . Les pensionnaires de l'hôtel se sont échappés et ont croisé les allemands qui les ont questionnées.Elles ont répondu qu'elles avaient vu deux maquisards, les allemands les ont laissé filer.

Les combats se passent dans le vois du Lys. Il y a quelque coups de mitrailleuse et tout à l'heure deux coups de canon, Un motocycliste allemand est parti chercher du renfort à Guéret.

14 juillet : En réalité il n'y a pas de bataille, seul un blessé allemand. Mais comme tous les maquisards s' étaient installés pour tirer, chez Ledon et Grainetier à la Brêche, les allemands après la fuite des maquisards ils se sont précipités et volés tous ce qu'ils ont trouvé (TSF... draps... jambons) Les Ledon et Grainetier étaient allés se réfugier à Réville. Le maquisards est allé à Réville et leur chef s'est entretenu avec K,,, Il est question d'établir un quartier général de l'Armée Secrète à Réville. Cette Armée Secrète du maquisards est parait-il fort bien organisée (GS le dit) et composé d'officiers seulement. Elle lutte contre les jeunes maquisards aventuriers ou communiste qui suivent le désordre sans rien faire de plus.

Le 14 juillet a été fêté dans tous les villages qui sont aux mains des maquisards ou même dans les villages qui ne sont pas sur la route nationale. Aussi Chambon a pavoisé. Il y a une cérémonie au monument au morts. Grande fête à Chénérailles, Mainsat...

15 juillet : On apprend qu'il y a une descente de la milice à Huriel. 51 personnes (hommes entre 16 et 50 ans) ont été convoqués et été amenés immédiatement. Elles ont à l'hôtel de l'écu à Montluçon. Conséquences probables à l'affaire Verneiges. Le maquisarde sur lequel il a tiré est mort de ses blessures.

17 juillet : Depuis hier on entend quelques détonations au loin. Se sont des ponts que des maquisards font sauter. Un pont sans importance semble t-il sur la route de Lussat et autre entre Domérat et Huriel. Le résultat de tout ça c'est que nous sommes la plupart du temps sans courant électrique.

17 et 18 juillet : Le bruit court et est bientôt confirmé . Aubusson et le camp de la Courtine ont été repris par les allemands. Ainsi que Felletin, la Courtine a été bombardé par 6 avions allemands.

Les allemands ont très peur des « terroristes ». Ceux ci on réussi sans montrer beaucoup de force et d'organisation à semer la panique dans les convois allemands qui passent.

Les groupes de maquisards ne sont pas tous recommandables. Beaucoup d'entre eux ne sont que des voyous, communistes ou agent de la Gestapo.

Ils sont quelquefois partis se réfugier dans le maquis après un mauvais coup. Ils reviennent ensuite au pays armés de mitraillettes et se vengent.

19 juillet : Ex à Saint-Loup. 3 jeunes maquisards de 20 ans environ dont un appelé « Grenon » sont arrivés avec mitraillettes au bourg dans plusieurs maisons et ont pillé et perquisitionné chez tous les gens dont ils avaient à se venger personnellement.

20 juillet : Le pont Charaud et le pont Rouge sont parait-il minés. Nous attendons qu'ils sautent.

21 juillet : Les allemands ont tué le chef du maquis du château de la Roche (démenti parait-il)

23 juillet : Depuis hier le courrier n'arrive ni ne part. Les trains sont supprimés dans la région et toutes les voies sur la ligne Montluçon-Guéret en particulier sautent. Il n'y a plus le matériel pour les réparer.

Aubusson : Depuis que la ville a été reprise par les allemands il y a eu comme représailles : des gens arrêtés et mis en camp de concentration sus à dénonciations.

Une garnison allemande très nombreuse est restée quelques temps. La ville à peu de mal. Une à deux vieilles maisons détruites et 3 morts. Dans tout le Sud de la Creuse, région dite du grand maquis, il y a sans cesse des engagements contre les allemands.

25 juillet : Quelques regroupements de maquisards de la Creuse ont été dissous et les jeunes gens renvoyés dans leurs familles. Tous ces regroupements manquent de cadres. Depuis le 22 tous les trains sont supprimés. Ainsi voyons passer des voyageurs à pied ou parfois en vélo avec de lourds bagages. D'autre part jeunes femmes venant de 15 kilomètres environ avaient demandé des voitures à cheval. Quelqu'un s'est offert de les conduire moyennement la somme de 750 francs.

26 juillet : Passage d'un convoi allemand. Beaucoup de soldats sont à pied. Ils cantonnent à Périgord Ils sont partis le lendemain matin à 6 heures et ont amené pour les conduire tous les métayers des environs. Monsieur Coury de Périgord, Fleurat, Latrige de la Chaux, Battu et Claveau, avec leurs chevaux. Aujourd’hui 27 quelques uns sont revenus.

31 juillet - 1er août : Visite du maquis. Trois ou quatre garçons viennent prendre du tissu chez Lemut (pour 80000 francs parait-il) et chez Giraud le tailleur. Aujourd'hui ils sont revenus dans un camion et sont allés chez Quentin et Floquet. Ils ont payé. Ils sont allés ensuite à la Croix Rouge rafler le tabac des prisonniers. Les allemands arrivent à l'instant discrètement, ont l'air pacifique. Les maquisards ont disparu discrètement

2 août : Visite des maquisards qui dévalisent Pradillon.

4 août : Les maquisards ont arrêté Boyer, le pharmacien d'Huriel qui était parait-il payer 8000 francs par mois par la Milice pour faire des dénonciations. Il est interné au château de Montflour.

L'impression générale jusqu'à présent est que le maquis mène la bonne vie, vole et pille partout où il peut et ne fait rien. Il y a un manque d'imagination évident tout au moins chez ceux qui viennent du petit pays. Beaucoup d’entre eux sont très jeune et « jouent au gangster. »

Nous avons vu à Gouzon deux maquisards de l'Armée secrète : ils portent une cordelière blanche en travers de la poitrine.

Il y a des gens qui songent tel que le marchand de vin Loignon à camoufler les rations des gouzonnais au lieu de leur vendre. Ce marchand a caché ce vin qui ne lui appartient pas chez monsieur Dorel et prive ainsi les habitants de Gouzon à leurs quatre litres mensuel,

7 août : Les maquisards dans une voiture de trois jeunes gens et d'un gendarme de Chambon on passé l'après-midi à Chambon. Je Jardinier **** a été appelé à la gendarmerie et interrogé pendant un long moment. (Il a dénoncé un réfractaire et est allé alors à la gendarmerie et comme ils refusent de prendre des notes) il se rend à la commandantur.

Les maquisards sont allés ensuite chez le marchand de vin Loignon et ont perquisitionné dans les endroits où celui-ci avait caché son vin. On ne connaît pas encore le résultat de l'enquête.

8 août ! Quelques maquisards ont passé la nuit dans une voiture près de Gouzon attendant l'arrivée du tabac.

L'atelier de chargement de Moulins à sauté.

9 août : On apprend que les allemands font des rafles à Chénérailles et à Montluçon.

10 août : Descente de la police allemande à Gouzon. Des soldats visitent au hasard certaines maison. L'hôtel est perquisitionné pour les armes, Deux officiers visitent quelques chambres de pensionnaires particulièrement celle des Pinasse qui sont israélites, partis à ce moment là se promener à vélo. Ils regardent le poste de TSF et prennent des livres sur Hitler. Chez le docteur Fauvet ils prennent « Mein kanf » et « Hitler m'a dit ».

Ils regardent s'il n'y a pas de poste émetteur et si les radios sont branchés sur Londres. Mais dans l'ensemble ils sont corrects. Ils avaient fait auparavant une descente à Chénérailles vers 6 heures du matin et on emmené quatre juifs, monsieur Monteil, sa femme et sa cousine. Monsieur Monteil était le chef de la résistance de Chénérailles. A Gouzon ils ont amené un certain Romanoff, frère d'un jeune maquisard. Puis ils sont partis sur la route de la Celle sous Gouzon.

12 et 13 août : Le maquis fait des descentes fréquentes sur Gouzon. Il a emporté en une matinée les deux tractions avant de monsieur Robert et est revenu le lendemain pour en emporter une troisième. Monsieur Robert leur a dit qu'il n'était pas le seul à Gouzon a posséder des tractions et a refusé de leur la donner. Ils lui ont alors demandé de désigner une personne. Il a refusé et leur a conseillé d'aller consulter les listes de la mairie. Les maquisards étaient très jeunes. Ils se trouvaient près du garage avec monsieur Robert quand ils ont entendu le roulement d'une voiture. Ils ont alors jeté leurs mitraillettes dans les arbustes qui se trouvent devant le café à la terrasse et on couru se réfugier dans le garage de l'hôtel. C'était un convoi allemand qui partait fort heureusement.

15 août : Il y a un commandant allemand tué a Graves près de Vallon. Les allemands ont fusillé 40 otages en représailles parmi lesquels monsieur Monteil de Chénérailles. Depuis le débarquement allié sur la côtes méditerranéenne la radio demande aux jeunes gens de la Résistance d'empêcher le passage de tous convois ennemis. Les jeunes maquisards de la région sont entrés en action. Ils sont massés sur la route de Guéret à partir de Parsac et attendent les convois allemands. Ils n'ont encore rien fait jusqu'à présent. Le curé de ****, collaborateur, a été enlevé par le maquis. Le bruit court qu'il est fusillé.

17 août : Nous avons vu passer une partie de l’État Major en fuite. Un convoi très long de camions et de petite voitures chargées de bagages personnels, des soldats, des soldats des chemins de fer, des secrétaires (beaucoup de femmes) Le convoi venait de Limoges en direction de Montluçon et après se dirigerai vers l'Alsace aux dires de quelques soldats.

18 août: Les maquisards se promènent dans Montluçon, maîtres en apparence. Les allemands peu nombreux sont à la caserne et ne sortent pas.

Guéret n'est pas libéré comme l'annonce l'Amérique. On ne sait pas ce qui s'y passe, Aucune nouvelle ne parvient.

Visite des maquisards à Gouzon. Ils sabotent le téléphone de la Poste.

21 août : Passage d'un convoi allemand annoncé depuis le 19, et venant sans doute de Limoges. Toute la matinée on entend des coups de canons et des rafales de mitrailleuses du côté d'Ajain. Toute la journée les gens de Gouzon attendent. Vers 17H30 la colonne arrive et va défiler pendant plus de deux heures. Il y a d'abord un tank, puis des camions et plus de 150 voitures. Mais on ose pas trop regarder car se sont des SS et ils ont une réputation de cruauté. Ils resterons un moment à Gouzon pour manger et vers 20H30 tous sont repartis sous la pluie et l'orage. Le début du convoi a été attaqué par quelques maquisards vers le pont Charaud. Mais ce sera sans importance à cause du mauvais temps je suppose (forte grêle et pluie). Les troupes passent et vont rejoindre celles qui sont enfermés dans la caserne de Montluçon.

Encore une fois les gouzonnais ont eu très peur. Beaucoup sont partis. Même Georges P qui est allé se fourvoyer vers l'aiguillon et a entre siffler les balles de mitraillettes.

Les gens, au lieu de suivre les conseils de Londres et rester calmes chez eux on fuit à Saint Loup ou Chénérailles à pied ou en vélo. Ils en ont quitte pour revenir tout trempés les soir et voir que rien de grave ne s'est passé. Mais tout les monde a eu peur... c'est un fait !

22 août ! Ce marin de bonne heure vers 4H un second convoi de miliciens et d'allemands cette fois. Nous espérons que ce soit les derniers.

Les miliciens passent les premiers avec leur famille, femme, enfants bagages. Ils s'arrêtent à Gouzon, prennent des vélos. Puis les allemands passent, prennent aussi des vélos, prennent la camionnette de monsieur Robert et réquisitionnent des voitures à chevaux pour les amener à Montluçon. Ils sont très fatigués. L'un d'eux nous dit qu'ils ne sont pas couchés depuis 6 nuits. Il y a des soldats dans toute la Creuse et la garnison de Guéret. Ils ont peur des maquisards et nous demandent s'il y en a ici. Ils disent avoir été attaqués à Bellac, Limoges et Bourganeuf.

Mais il n'y a pas de crainte à avoir … ils ne seront pas sans doute attaqués par les maquisards... ceux-ci sont plus prudent que braves et n'écoutent pas les consignes de Londres. Et si le convoi d'avant hier n'a guère subi de dommages, celui de ce matin n'en subira pas non plus. Évidemment ils ne sont pas en nombre suffisant mais la colonne d'aujourd'hui est facilement vulnérable : beaucoup de soldats sont dans des charabancs. Beaucoup sont à pied ou en vélo. Il n'y a que les chefs qui sont en voiture et quelques camions de soldats.

Nous apprenons à l'instant par un instituteur qui arrive de Guéret que deux camions mystérieux sont là-bas vers la préfecture... il n'en faut pas plus pour dire que le tout Gouzon dise que ce sont les américains. Nous les attendons mais c'est plutôt des maquisards qui avaient appris le passage des allemands se sont précipités pour « libérer » Guéret. Guéret a été généreusement libéré par les FFI. Il en a été de même pour Limoges où les allemands sont partis sans que les autres les attaquent.

25 août : Depuis hier grosse circulation de maquisards. Une voiture de trois maquisards nous annoncent que Guéret et Montluçon sont libérés. Mais nous ne savons encore rien de précis.La colonne milicienne et allemande se bat du côté de Lamaids et de Quinssaines. Les miliciens ont brûlé deux fermes dans ce secteur et ont abîmé la maison de Servan (auberge après la côte d'Auge). Ils sont beaucoup plus virulent que les allemands qui semblent à bout de force. Ceux-ci on d'ailleurs abandonné sur la route nationale un grand nombres d'objets : ravitaillement, balles de farine, pâtes, biscuits, armes mitraillettes, vêtements, couvertures... beaucoup de jeunes gens se sont précipités et ont ramassé tout cela. Le matin un avis du maire Labarre invite tous les larrons à remettre ces objets à la mairie sous peine de sanctions graves.

29 août : La colonne marche vers Quinssaines. Là il y a une bataille ou les allemands abandonnent des voitures.... des armes.

Ils sont refoulés sur la route et prennent la direction d'Huriel. Arrivés là-bas ils se battent du côté de la gare mais aucunes représailles sur la population... de la direction la Chapelaude, Vallon. Ils avaient emmené avec eux 6 hommes de Gouzon avec des voitures à cheval.Quatre sont rentrés hier soir.

Hier, monsieur Robert est allé en vélo à Montluçon pour essayer de récupérer sa camionnette abandonnée pas les allemands à Lamaids et prise par les maquisards. A Montluçon on l'a envoyé de groupes de Résistance en groupe de résistance. De l'hôtel de ville à Dunlop on l'a envoyé à Néris les bains mais il n'a pas réussi à savoir ce qui était devenu de sa voiture. Il nous a dit que Montluçon était tout pavoisé, que les maquisards menaient la belle vie et roulaient en voiture toute la journée. Il y a plusieurs groupes de maquisards. Malgré les ordres de De Gaulle qui voulait que tous les maquisards se rallient aux FFI (ceux qui précèdent sont les communistes et les FTP. Et dans tous les groupe aucune organisation... bureaucratie pire que 1939.

A Gouzon depuis trois jours sont arrivés quelques maquisards FTP qui forment une commission de nettoyage. Un autre groupe extrémiste a arrêté hier :

Mr ****

Mr ****

Mr ****

Mr ****

Mr ****

Ce matin ils ont été amené dans une direction inconnue pour les interroger.

31 août : Un comité de libération est créé à Gouzon à la demande nu nouveau préfet Castaing. Le colonel est appelé et revient de Réville.

Les membres sont nommés. A la tête : Guyonnet nommé Président car il s'est occupé de tout et est allé à Guéret.

Premier adjoint le colonel

2ème adjoint Cathalot (tendance communiste anciens internes de Vichy)

Ils s'occupent du ravitaillement : M.H.Beaune, Pinet, Deladeuille, Pradillon, Vignaudon

Travaux : Pourradier, Vergeron Romanet, Claveau, Brandon,

Hygiène : Graveron

Ce comité a supprimé l'ancien maire Labarre. Il obéit au nouveau gouvernement. Il joue le tampon entre la population et les maquisards. Ainsi le maquis ne peux plus réquisitionner directement. Il doit passé le le Comité de Libération.

C'est le Président, le colonel et Cathalot qui octroient ou non les bons de réquisition. (Cela n'a pas très bien été accueillis par les maquisards qui se trouvent à Gouzon mais ils sont bien forcés de s'y soumettre. Le Comité de Libération a fait savoir que tous les délateurs seraient punis d'amende de 500 à 15000 francs. Cela pour éviter les dénonciations innombrables.

Hier les maquisards avaient besoin de vélos et de voitures. Le colonel a fait prendre 7 vélos chez des collaborateurs : ****, ****, ****, ****, **** et 2 voitures chez des collaborateurs également : ****, ****et une voiture chez **** mais . On avait demandé la voiture du ****, mais elle ne marchait pas parait-il.

Lundi 4. Première réunion du comité. Une liste de suspect va être établie.

2 septembre : Visite incognito de notre préfet Castaing. Au cours du déjeuner il donne quelques indications sur les mouvements de la Résistance. Les FFI, mouvement officiel, sont moins cotés car il y a moins d'ordres et de discipline chez eux. Voilà pourquoi beaucoup de jeunes gens se dirigent vers les FTP qui ne sont pas forcément communistes. En Creuse 23 à 27% seulement des FTP et communistes. En Corrèze par contre c'est l'inverse.

Puis Castaing dit qu'au point d'une des arrestations, seuls les miliciens doivent subir la peine de mort. Pour tous les autres (collaborateurs par exemple) il faut faire une déclaration écrite et signée de ce qu'ils ont fait ou dit, ou ce sera la prison ou les amendes, Castaing fait surtout appel à la mesure. Il dit avoir très peur des vengeances personnelles. Il sabrera tous les dénonciateurs.Pour l'instant c'est le tribunal militaire qui juge. Ce sera bientôt le tribunal civil. Le tribunal militaire est présidé par l'avocat Lemoine, très doux. Le préfet pense que cette période révolutionnaire va être dur à passer. Il fait appel à la bonne volonté de tous. Il accepte tous les partis mais ne veut pas entendre parler de partis... ce n'est pas le moment. Tout ce qu'il dit est réellement intelligent et utile.

8 septembre : Castaing a conseillé à quelques jeunes gens de Gouzon (dont Dédé Sourdille, Du Cluzeau...) de rentrer à l’École de la Garde. On va ainsi les éduquer le plus vite possible (Ils rentrent lundi prochain 12). Ils se sont engagés pour toute la durée des hostilités.

9 septembre : 12 avions allemands ont survolé et mitraillé la région à la matinée.

Huriel : 2 morts

Domérat : 3 morts

Lavaufranche : 2 blessés.

10 septembre : On entend plus parler du maquis de Toulx Sainte Croix très communiste qui avait arrêté **** et ****. Ceux-ci dont Castaing s'est occupé immédiatement ont été transférés à Guéret, ils sont à l'école des garçons, relativement libres car il n'y a pas de mandat d'arrêt.

12 septembre : Le seul inscrit au parti milicien dans tout Gouzon est monsieur ****, vieil homme sale et antipathique et très riche. Il figure sur les listes établies à Guéret. Il a sa carte mais il ne l'avais pas signé. Une perquisition a permis de trouver chez lui 4 revolvers et 189 balles... je crois. Il avait déjà été arrêté. Un groupe d'FFI avec à sa tête un jeune juif officier, Berhheim, connu à Gouzon car il était revenu se réfugier avec ses parents en 1940. Il était presque un petit garçon à l'époque.

Chez monsieur **** il y avait un stock de 200 paires de draps, plusieurs barriques de rhum ; d'absinthe etc... un stock du sucre et d'huile considérable... et autres !

Les FFI ont parait-il pris plus que le stock jusqu'aux derniers paires de draps et de chaussettes. Ils sont même allés à l'intérieur de chez ****, ce qui n'aurait pas du être. Beaucoup de gens sont mécontents de cela bien qu'ils ne plaignent pas ****, encore de savoir que c'est un juif qui a fait cela. La même chose c'est d'ailleurs produite aux Trois-Fonds chez **** ou les maquisards ont vidé les armoires et volé tous les vêtements de la famille.

13 septembre : On dit ici qu'un groupe de communistes est entrain de se former avec le fils Vergeron entête. Il y a certainement plus de communistes ici qu'on se l'imagine. Madame Bouchaillon et madame Romanet sont plus acharnées que les hommes « L'oncle Paul certainement aussi »

Dans le Centre Républicain qui remplace celui de Pétain un petit article est consacré à Verneiges. Verneiges, protégé par les allemands était parti à Vichy avec son fils et le fils Perier. Ils sont arrêtés. Verneiges a tenté de se suicider. Il est à l'hôpital et va être probablement fusillé.

14 septembre : Le gendarme de Gouzon **** emmené par les maquisards il y a environ deux mois a été, nous l'apprenons aujourd'hui, assassiné trois ou quatre jours après son arrestations dans les bois du côté de Toulx-Sainte-Croix et abandonné sans sépulture. Il avait fait exécuter un maquisard et avait fait du marché noir.

16 septembre :La milice patriotique qui s'appelle ainsi et non gardes patriotiques. Les FFI communistes les veulent car ils semblent être très puissant. Et peut-être la liberté va elle encore s’amenuiser sous le régimes des milices patriotiques. Tout le monde ou presque vit dans l'attente et la crainte de l'approche du communisme.

On a rendu des crosses de fusils. Partout dans la campagne on entend tirer des coups mais que la chasse n'est pas encore ouverte.

17 septembre : Réunion à la mairie de Gouzon où sont conviés les hommes seulement et qui a pou but d'expliquer le rôle des milices patriotiques. D'après le colonel se ne sera qu'un renfort de la gendarmerie. Ceux qui ne sont pas inscrit conservent leur métier et on ne fait appel à eux que si nécessaire.

18 septembre ! Tous les prisonniers de Gouzon arrêté voici trois semaines ont été remis en liberté aujourd'hui sans être jugé.

FIN

Ce cahier de la Libération de Gouzon offre un aperçu fascinant de la vie quotidienne pendant la période mouvementée de la libération de la ville. Il montre la peur, l'excitation et l'incertitude ressenties par les habitants alors que les forces allemandes et les maquisards se disputaient le contrôle de la région.

Les détails des événements rapportés par René Mazedier nous plongent directement au cœur de l'action, nous permettant de ressentir l'atmosphère tendue qui régnait alors. Les attaques, les représailles, les pillages, tout est raconté avec une précision qui nous permet de comprendre la complexité de la situation.

Le rôle des différents acteurs, des maquisards aux forces allemandes en passant par les civils et les autorités locales, est clairement exposé. On voit comment chaque groupe tentait de protéger ses intérêts et de naviguer dans un monde en pleine évolution.

Les décisions prises par les autorités locales, comme la création d'un comité de libération et le contrôle des réquisitions par ce dernier, nous montrent les efforts déployés pour maintenir l'ordre dans un contexte chaotique.

Enfin, les récits des vengeances personnelles, des représailles et des luttes de pouvoir entre les différents groupes nous donnent un aperçu édifiant de la réalité de la guerre et de la libération d'une ville rurale de la Creuse.

Ce cahier de la Libération est une ressource précieuse pour comprendre l'histoire locale et pour se souvenir des difficultés et des sacrifices de ceux qui ont vécu ces événements tumultueux. Il nous invite à réfléchir sur les conséquences de la guerre et sur la résilience des communautés locales face à l'adversité.

Photo Archives de la Creuse 14 heures - Voiture du maquis place Bonnyaud, Guéret

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